Lecture de Babylon Babies
DestructZion
Par Olivier Noël
Maurice G Dantec s’affirme avec son dernier roman comme un des auteurs les plus singuliers du paysage littéraire français. Il réussit le prodige de livrer une œuvre à la fois populaire et intelligente, voire visionnaire. Babylon Babies s’apparente en effet aux feuilletons d’antan (Alexandre Dumas) autant qu’aux ouvrages de science fiction à portée philosophique (Philip K Dick). L’auteur n’a jamais caché son intérêt pour les travaux de Gilles Deleuze et Félix Guattari ou Nietzsche, qui nourrissent copieusement son œuvre. Son mérite est de ne justement pas exhiber ces références , mais au contraire de les intégrer au récit et à son élaboration. La théorie deleuzienne du chaos déterministe sous-tend ainsi dans le même temps le récit et le discours, c’est-à-dire qu’elle joue un rôle primordiale dans l’histoire racontée et qu’elle semble parallèlement déterminer l’orientation de son cours. Les événements qui s’y déroulent, pourtant tous plus extravagants les uns que les autres, apparaissent dès lors comme un enchaînement logique et inéluctable. En ce sens le récit est inchoatif : il s’auto-engendre. Le fantastique se mue instantanément en syllogisme, ce qui a pour conséquence de le remettre sur les rails du roman populaire.
Dantec semble d’ailleurs très conscient de la nature schizophrénique (roman de gare et réflexion sur le devenir de l’homme) de son livre. Babylon Babies s’affirme peu à peu comme une mise en abyme de sa propre genèse.
Le personnage de l’écrivain en est bien sûr la plus parfaite manifestation. Qui pourrait ne pas voir en Boris Dantzik le double de Maurice Dantec ? Dantzik est de toute évidence l’image spéculaire de Dantec, ce qu’atteste en premier lieu la ressemblance frappante des noms. Car plus qu’un simple clin d’œil, l’immixtion de l’écrivain dans son propre roman est porteuse de sens. Il montre que Dantec considère ses " élucubrations " comme telles, comme des délires d’auteur de science fiction. Mais derrière cette apparente modestie se cache une ambition déraisonnable, une mégalomanie ostentatoire. Dantzik parle à Toorop :
" J’avais imaginé l’histoire d’une schizophrène à personnalités multiples qui devenait l’enjeu de l’économie du futur. Je m’étais inspiré des travaux de Deleuze et Guattari, mais aussi de Timothy Leary, de Mc Kenna, ou d’autres pionniers des sciences neuronales. (…) Lorsque je suis arrivé à Montréal (…) je voulais faire une ultime moisson d’informations, ajouter un peu de réalité à mes élucubrations (…). "
Pour lire la suite si affinités, dorades au soleil et temps imparti ...
DestructZion
Par Olivier Noël
Maurice G Dantec s’affirme avec son dernier roman comme un des auteurs les plus singuliers du paysage littéraire français. Il réussit le prodige de livrer une œuvre à la fois populaire et intelligente, voire visionnaire. Babylon Babies s’apparente en effet aux feuilletons d’antan (Alexandre Dumas) autant qu’aux ouvrages de science fiction à portée philosophique (Philip K Dick). L’auteur n’a jamais caché son intérêt pour les travaux de Gilles Deleuze et Félix Guattari ou Nietzsche, qui nourrissent copieusement son œuvre. Son mérite est de ne justement pas exhiber ces références , mais au contraire de les intégrer au récit et à son élaboration. La théorie deleuzienne du chaos déterministe sous-tend ainsi dans le même temps le récit et le discours, c’est-à-dire qu’elle joue un rôle primordiale dans l’histoire racontée et qu’elle semble parallèlement déterminer l’orientation de son cours. Les événements qui s’y déroulent, pourtant tous plus extravagants les uns que les autres, apparaissent dès lors comme un enchaînement logique et inéluctable. En ce sens le récit est inchoatif : il s’auto-engendre. Le fantastique se mue instantanément en syllogisme, ce qui a pour conséquence de le remettre sur les rails du roman populaire.
Dantec semble d’ailleurs très conscient de la nature schizophrénique (roman de gare et réflexion sur le devenir de l’homme) de son livre. Babylon Babies s’affirme peu à peu comme une mise en abyme de sa propre genèse.
Le personnage de l’écrivain en est bien sûr la plus parfaite manifestation. Qui pourrait ne pas voir en Boris Dantzik le double de Maurice Dantec ? Dantzik est de toute évidence l’image spéculaire de Dantec, ce qu’atteste en premier lieu la ressemblance frappante des noms. Car plus qu’un simple clin d’œil, l’immixtion de l’écrivain dans son propre roman est porteuse de sens. Il montre que Dantec considère ses " élucubrations " comme telles, comme des délires d’auteur de science fiction. Mais derrière cette apparente modestie se cache une ambition déraisonnable, une mégalomanie ostentatoire. Dantzik parle à Toorop :
" J’avais imaginé l’histoire d’une schizophrène à personnalités multiples qui devenait l’enjeu de l’économie du futur. Je m’étais inspiré des travaux de Deleuze et Guattari, mais aussi de Timothy Leary, de Mc Kenna, ou d’autres pionniers des sciences neuronales. (…) Lorsque je suis arrivé à Montréal (…) je voulais faire une ultime moisson d’informations, ajouter un peu de réalité à mes élucubrations (…). "
Pour lire la suite si affinités, dorades au soleil et temps imparti ...
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